Édition numérique des Œuvres complètes du poète Michel d’Amboise (c. 1505-c. 1547)
Ce projet trouve son origine dans le constat établi il y a vingt ans par Richard Cooper de la nécessité d’éditer les œuvres de Michel d’Amboise, longtemps ensevelies dans un oubli profond, et de faire échapper l’esclave fortuné à la malédiction qui semble le poursuivre après sa mort (« Michel d’Amboise, poète maudit ? », La Génération Marot : Poètes français et néo-latins (1515-50), éd. G. Defaux, Paris, Champion, 1997, p. 445-470). Richard Copper a souligné notamment les talents de traducteur du poète qui adapte aussi bien des œuvres de l’antiquité latine (Ovide, Juvénal) que des textes néolatins ou italiens contemporains (Spagnuoli, Fregoso, Angeriano). Par le biais de la traduction, il contribue à la renaissance des lettres en France dans les années 1530 où il introduit notamment l’épigramme (1533). Mais Richard Cooper attire aussi l’attention sur ses œuvres personnelles, poésies françaises et néolatines, et sur son unique œuvre en prose, Le Guidon des gens de guerre (1543), qui s’appuie sur l’expérience du « capitaine Chevillon ». Il voit ainsi en lui un « digne membre de la génération de Marot, à redécouvrir », d’autant plus que ses œuvres, pour certaines plusieurs fois rééditées au cours des années 1530-1540, sont lues, par Rabelais, Scève ou encore Du Bellay. Notre projet d’édition vise donc à répondre à cette invitation, qui se justifie par la variété des talents dont fait preuve Michel d’Amboise dans plusieurs genres (épître, épigramme) et par son rôle de passeur. Il a aussi pour objectif d’apporter un nouvel éclairage sur la génération poétiques des années 1530-1540 laissée dans l’ombre par la coupure qu’ont tracée les poètes de la Pléiade et leurs grands éditeurs modernes. Notre entreprise s’inscrit ainsi dans une dynamique des études seizièmistes qui s’attachent à remettre en lumière cette génération méconnue, notamment en produisant des éditions critiques destinées à combler un vide du paysage littéraire de la Renaissance française – nous pensons en particulier à l’édition en cours des œuvres de Jean Bouchet sous la direction de Nathalie Dauvois à l’Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle et au projet d’édition numérique des œuvres de Charles Fontaine que dirige Élise Rachjenbach à l’Université Jean Monnet de Saint-Étienne.
Objectifs, nature des réalisations et des "livrables" - Fonction du site web/production technique
Le site internet « Michel d’Amboise » constitue le volet numérique du projet d’édition critique des Œuvres complètes du poète Michel d’Amboise (c. 1505-c. 1547) dirigé par Sandra Provini. Il fournira une base de données pensée en complémentarité avec les cinq volumes à paraître aux éditions Honoré Champion dans la collection « Textes littéraires de la Renaissance », sans faire concurrence à l’édition « papier » selon l’accord conclu avec le directeur de collection. Cette base de données comprendra :
- le texte brut de toutes les œuvres de Michel d’Amboise présenté dans une transcription diplomatique à partir de l’édition princeps ainsi que le texte établi (mais sans l’apparat critique et les notes qui seront réservés à l’édition papier). La transcription diplomatique sera utile aux historiens de la langue tout comme aux historiens du livre. Le texte établi pourra quant à lui alimenter les bases de données numériques (Frantext, etc.). L’usager du site pourra passer de la version diplomatique à la version corrigée et régularisée d’un simple clic dans un menu grâce à l’emploi de balises XML-TEI.
- les sources de toutes les traductions réalisées par Michel d’Amboise, qu’il s’agisse d’œuvres en latin classique (Juvénal, Ovide), en néolatin (le Mantouan) ou en italien (Angeriano, Fregoso). Le texte source, transcrit à partir de l’édition utilisée par Michel d’Amboise, sera donné à gauche de l’écran, sa traduction à droite, ce qui permettra de mettre en évidence tous les ajouts effectués par le poète qui amplifie et actualise systématiquement les textes qu’il traduit.
- dans le cas du recueil des Épîtres vénériennes (1532) qui reprennent deux recueils antérieurs, les Complaintes de l’esclave fortuné (1530) et La Penthaire (1531), le site proposera de retrouver, à partir de chaque pièce des Épîtres vénériennes, sa position dans le recueil précédent. Michel d’Amboise a en effet remanié en profondeur ses deux premiers recueils pour suivre le modèle établi par Clément Marot dans L’Adolescence clémentine en 1532. Ainsi, alors que les Complaintes proposaient une série d’épîtres suivies chacune de deux rondeaux, les Épîtres vénériennes regroupent les épîtres dans une section, les rondeaux dans une autre, adoptant le classement générique marotique. Le site permettra ainsi de mettre en évidence le travail de réécriture et de recomposition opéré par Michel d’Amboise sur ses premières œuvres et contribuera à l’histoire de l’évolution du recueil poétique français dans les années 1530-1540.